Archives de catégorie : Analyse de Cycle de Vie
L’achat d’un ordinateur remis en état : est-ce toujours la meilleure solution?
Vous souvenez-vous de l’ère du portail web en 2 versions : haute-vitesse et « l’autre »? C’était l’heureuse époque où les consommateurs rejoignant l’internet par ligne commutée (traduction : le bon vieux « dial-up ») pouvaient encore demeurer devant leur ordinateur pendant qu’ils accédaient à leurs données. Maintenant, ces consommateurs doivent aller se faire un café (ou plusieurs) avant de voir apparaître le premier fragment d’information lors de la visite d’un site web. C’est que ces sites sont maintenant très chargés et que pour les consulter, l’utilisation d’un modem sur ligne téléphonique n’est plus une option(*). On a beau avoir l’ordinateur le plus puissant du monde, le plus petit dénominateur commun demeure dans ce cas la connexion internet, et une connexion trop lente ruine l’expérience de l’utilisateur.
Ceci m’amène au sujet du jour : les ordinateurs et le recyclage en vue de leur réutilisation. À regarder la pyramide de la gestion des déchets (en référence au 3RV), on constate que la réutilisation est plus proche du « souhaitable » que l’élimination, et c’est tant mieux. Des entreprises se spécialisent d’ailleurs dans la remise en état d’ordinateurs, en y apportant certaines mises à jour à la fois matériel (augmentation de la mémoire RAM par exemple) et logiciel (installation d’une version récente du système d’exploitation). Ceci permet de donner une seconde vie à ces ordinateurs qui peuvent encore offrir quelques années de bons services.
Mais est-ce toujours une bonne idée de se procurer ces ordinateurs remis en état, pour des besoins personnels? Je pose la question en revenant à mon analogie du « dial-up ». Il est maintenant évident que les systèmes d’exploitation, les logiciels, et l’accès à des sites web de haut niveau demandent à ce que les ordinateurs soient de plus en plus performants. On peut n’avoir aucune donnée conservée localement sur son ordinateur (elles seraient alors sauvegardées dans le Nuage), mais on ne peut les accéder (ou du moins, difficilement) que si notre ordinateur rencontre la performance minimale requise. Le matériel est donc intimement lié au logiciel, et sans dire qu’ils doivent se suivre au millimètre près, ils ne peuvent être décalés de trop. Afin de répondre à nos exigences applicatives, les logiciels que nous utilisons demandent maintenant des prérequis matériels appropriés (RAM, CPU, etc.). L’achat d’ordinateurs remis en état pour alors s’avérer être une erreur, selon nos besoins. Évidemment, il y aura toujours une clientèle qui, pour des besoins occasionnels (jeux pour enfant, accès internet modéré, lecture de courriel, traitement de texte, etc.), n’a pas besoin de toute la puissance d’un ordinateur récent, pourvu que ce dernier soit équipé de logiciels appropriés, par exemple en évitant l’installation de la dernière version d’Office, qui pourrait être trop « lourde » pour les capacités de l’ordinateur.
Heureusement, la rapidité des changements matériels et logiciels devient de moins en moins perceptible pour l’humain (est-ce vraiment utile d’avoir une microseconde de meilleure performance lorsqu’on utilise un logiciel de traitement de texte?), ce qui nous permet de conserver nos ordinateurs personnels plus longtemps sans être pénalisé en termes d’expérience utilisateur. Encore là, cela dépend de nos besoins (les joueurs de jeux vidéo voudraient par exemple maintenir une performance maximum), et ceci n’inclut pas les ordinateurs de type serveurs qui eux tirent avantage à suivre la loi de Moore afin d’augmenter leur capacité et ainsi faire plus (de traitement de données) avec moins (de serveurs, donc économie à l’achat, en énergie, etc.).
Il n’y a donc pas d’équation parfaite. La solution pourrait être dans la « Réduction » : acheter un ordinateur aujourd’hui et le conserver beaucoup plus longtemps… Peut-être est-ce le temps de monter d’un cran dans la pyramide des 3RV?
* Sachez que selon des statistiques récentes, AOL aurait encore 3.5 millions d’abonnés à la connexion « dial-up ».
PS : Mon ordinateur aura bientôt 3 ans, et je ne planifie pas le changer puisqu’il satisfait toujours mes besoins… J’espère seulement que sa vie utile sera à la hauteur!
TIC en papier pour le Nouvel An chinois
Crédit: Jess Silverstone. Ici pour le mode d’emploi
Il semble que les TIC en papier ont la cote pour le Nouvel An chinois! Les offrandes pour l’Hommage aux ancêtres ont pris le tournant du 21e siècle, et se traduisent maintenant par des produits tels que des iPads ou des téléphones mobiles, en version carton/papier.
Encore ici, il faudrait faire une analyse de cycle de vie pour évaluer les impacts entre les gadgets réels et leur version carton. Bon, d’accord, je ne dis pas cela sérieusement…
Bonne année!
CES 2012 : Prix innovation, catégorie Eco-Design and Sustainable Technologies
J’aimerais amener aujourd’hui le sujet de Cycle de Vie de produits. C’est en feuilletant (virtuellement, sur mon iPad) les produits du CES 2012 que j’ai eu mon « eurêka moment » : un des produits honorés est-il vraiment vert?
On connait bien certains paradoxes : si une voiture électrique est alimentée par une source électrique provenant d’une centrale au charbon, est-ce vraiment un meilleur choix qu’une voiture à essence? Si votre tomate d’hiver pousse dans une serre québécoise, est-elle un meilleur choix qu’une tomate importée d’un pays où la chaleur et le soleil sont au rendez-vous toute l’année? Seule une analyse de cycle de vie de ces produits pourrait nous offrir une réponse avec justification.
Le produit dont il est question est un étui solaire de SolarFocus Technology Company Ltd pour votre Kindle, qui permet une recharge du Kindle et de le protéger du même coup. Il a été sélectionné dans la catégorie Eco-Design and Sustainable Technologies [Mise à jour janvier 2014: la liste 2012 de ces prix n’est malheureusement plus disponible]. Il se décrivait comme
Not only the epitome of GREEN, but also provide consumers with utility for powering their Kindle while « On the go ».
Wow, « epitome of GREEN » (que l’on pourrait traduire par un modèle environnemental), vraiment?
Si l’on regarde la page des spécifications pour ce produit (en date de la publication de cet article), on ne retrouve qu’une fois le terme Environnement (« The first solar book cover for the Amazon Kindle e-reader takes an environmentally friendly approach to enhancing form and utility. »), et une fois le terme Vert (« Show-off Your “Green” Gadget Everywhere You Go »). Et ce sont à peu près les seules prétentions environnementales décrites. Plutôt mince…
Pourquoi ai-je un problème avec ce produit? Sa fonction est un étui protecteur (aucun problème avec ceci), où l’on a intégré un panneau solaire permettant la recharge du Kindle sans avoir à le recharger de façon conventionnelle. Le panneau solaire remplace alors l’électricité utilisée lors d’une recharge, et seule une analyse de cycle de vie pourrait nous éclairer sur la prétention verte entre les impacts liés à la fabrication, utilisation et disposition du panneau solaire et les avantages qu’il offre sur la consommation d’énergie pour la recharge du Kindle. L’intégration d’un panneau solaire a d’autres avantages de type utilitaire : une plus grande autonomie dans l’usage du Kindle avant qu’une recharge conventionnelle ne soit nécessaire. Ici, on ignore la fonction du Kindle lui-même (celle du e-book) car ce n’est pas la fonction de l’étui (l’étui existe à cause de l’existence du produit Kindle).
Un autre facteur à considérer est la durée de vie du produit. L’étui en question est conçu exclusivement pour un seul produit (l’étui est moulé pour prendre la forme d’un modèle de Kindle), ce qui lie sa durée de vie à la vie du Kindle en question. Est-ce une bonne approche d’éco-conception? Qu’arrivera-t-il lorsqu’un nouveau modèle de Kindle aux dimensions différentes sera disponible? Les étuis précédents deviendront obsolètes? Quelle est la durée de vie programmée du Kindle (celle où le produit est rendu obsolète par l’arrivée de nouveaux produits plus performants et attirants)? Je serais prête à gager que la durée de vie réelle est plutôt courte…
J’avoue avoir lancé plus de questions que de réponses, n’ayant pas de données pure et dure. J’avoue ne pas avoir couvert d’autres aspects liés au Kindle et son étui. Voilà justement où se joue la communication verte : avec le peu d’information sur ce produit, j’ai peine à croire qu’il pouvait se qualifier dans la catégorie Eco-Design and Sustainable Technologies. Mais voilà tout le débat autour des gadgets présentés au CES.